Sur fond de guerre, un match de football ukrainien dure cinq heures

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dnipro-1 Oleksandria, le match le plus long de l'histoire
dnipro-1 Oleksandria, le match le plus long de l’histoire ©Imago/DSC_6951

Dans une scène surréaliste qui mêle sport et tragédie, un match de football du championnat ukrainien opposant le SC Dnipro-1 au FC Olexandriya à a duré cinq heures, non pas à cause des prolongations ou des pénalties, mais en raison de la guerre qui sévit dans le pays.

Quand le sport est rythmé par la guerre

Le lundi 6 novembre, le Dnipro a accueilli l’équipe d’Oleksandria lors de la 13e journée de la première division ukrainienne. Ce qui aurait dû être un événement sportif comme un autre a pris une tournure dramatique, illustrant la persistance du conflit entre l’Ukraine et la Russie.

La première mi-temps s’est déroulée sans incident, avec une ouverture du score par l’équipe locale et son attaquant Filippov à la demi-heure de jeu. Cependant, la seconde mi-temps a été marquée par des interruptions répétées dues à des bombardements russes à proximité du stade. À la 55e minute, l’arbitre a été contraint de renvoyer les joueurs aux vestiaires pendant dix minutes suite à une première série de bombardements.

La rencontre a repris, mais seulement pour quinze minutes supplémentaires avant qu’un second arrêt, cette fois d’une heure, ne soit nécessaire en raison d’une nouvelle vague d’attaques. Le match a finalement repris, mais a été interrompu à deux autres reprises, étendant le temps de jeu à cinq heures d’une lutte non seulement pour les points, mais aussi pour un semblant de normalité dans un pays déchiré par la guerre.

Ce match est devenu un symbole poignant de la résilience ukrainienne, où même le football, souvent considéré comme une évasion des dures réalités de la vie, n’est pas à l’abri des impacts du conflit. Les images et les récits de cette rencontre ne parleront pas de tactiques ou de performances athlétiques, mais plutôt de la détermination des joueurs, des officiels et des fans à poursuivre leur passion malgré les circonstances les plus sombres.

L’incident soulève des questions sur la sécurité et la viabilité de la poursuite des activités sportives dans des zones de conflit. Alors que certains pourraient voir dans la continuation du match un acte de défi face à l’agression, d’autres pourraient s’interroger sur les risques encourus par tous ceux présents.

Au-delà du score, ce match restera dans les annales comme un témoignage de la période troublée que traverse l’Ukraine. Il rappelle au monde que, même dans les moments de loisir et de jeu, l’ombre de la guerre plane, prête à rappeler sa présence cruelle et inopportune.
Les joueurs et les spectateurs de ce match ne cherchaient pas à faire des déclarations politiques, ils voulaient simplement jouer et regarder le jeu qu’ils aiment. Mais leur expérience ce jour-là a montré que le football, comme toute autre facette de la vie en Ukraine, est désormais inextricablement lié au conflit qui continue de ravager leur nation.

Alors que le monde continue de regarder avec inquiétude les événements en Ukraine, ce match de football de cinq heures restera un rappel puissant de la persévérance humaine face à l’adversité et de la capacité du sport à unir les gens, même dans les moments les plus sombres.

Une attente épuisante

Dans son interview donné un jour après le match, l’attaquant Oleksandr Filippov revient sur ce match bien particulier qu’on vécu les deux équipes.

C’était le match le plus long, la VAR a passé une heure à vérifier votre hors-jeu… Ça ne vous a pas ennuyé ?

(sourit) Si, c’était très difficile, à la fois physiquement et psychologiquement. On a joué pendant presque 5 heures, mais c’est notre réalité, notre vie quotidienne et footballistique, et on doit s’adapter. Ce n’est pas agréable, c’est très difficile, mais c’est comme ça. Heureusement, on a terminé ce match. C’était dur, mais on a gagné et on va se préparer pour le match contre le «Shakhtar».

Expliquez la physiologie d’un athlète qui joue au football, puis fait une pause prolongée, et doit retourner sur le terrain. Les athlètes ne sont pas préparés à ça. Quelle est la problématique pour l’organisme ?

Quand tu atteins un certain pic, que tu travailles au maximum de tes capacités, puis que tu prends une pause, tout s’arrête comme si tu tombais au plus bas. Le plus difficile, c’est de ne pas savoir quand le jeu reprendra : dans 15-20 minutes, comme après la première alerte, ou dans une heure et demie, comme après la troisième alerte. Mais c’est bien d’avoir quelques minutes d’échauffement pour se dégourdir un peu.

Que faisiez-vous pendant les pauses? Vous vous êtes juste assis ?

On s’asseyait, on se levait, on s’étirait, on faisait des massages.

Des cartes ?

(sourit) Non, on n’en est pas arrivés là, mais on en avait envie. Surtout pendant la pause prolongée après la troisième alerte, quand on a attendu une heure et demie pour jouer quelques minutes.

Le SC Dnipro-1 ira jouer contre le Shakhtar le 12 novembre prochain.