Ce mardi, le président de la FIFA Gianni Infantino était au Qatar pour y rencontrer son ministre du Travail. La veille, l’instance dirigeante du football avait annoncé qu’elle allait rencontrer prochainement des représentants de l’ONG Amnesty International qui lutte pour les droits de l’homme dans le monde. Alors que le Mondial qatari doit débuter dans 8 mois, les conditions de son organisation font toujours autant débat et la FIFA marche sur des œufs
Le Mondial de foot comme vecteur de progrès social selon la FIFA …
Le président de la FIFA Gianni Infantino a donc rencontré le ministre du Travail du Qatar, Ali bin Samikh Al Marri, ce mardi. Ce dernier a notamment déclaré que “l’Etat du Qatar a été un pionnier dans la modernisation du droit du travail et des réglementations relatives au bien-être des travailleurs”. Juste après son entrevue, suivant le même discours, dans un communiqué de l’instance, le président Infantino a ainsi salué les “progrès importants réalisés au cours de la dernière décennie” sur les droits et le bien-être des travailleurs.
Il a ensuite ajouté que “des réformes législatives historiques ont été introduites et ont déjà apporté des avantages concrets à des centaines de milliers de travailleurs migrants. Il reste encore des défis à relever – comme dans de nombreux autres pays du monde – mais les progrès réalisés ces derniers temps sont indéniables, tout comme l’engagement à apporter des changements sociaux positifs”.
Dans sa déclaration, la FIFA a salué en particulier “la nouvelle loi sur le salaire minimum” qui aurait déjà permis d’augmenter le salaire de 280 000 travailleurs, ainsi que l’interdiction de travailler par plus de 32,5 C° (la température moyenne dans le pays y est plus élevée de mai à septembre) qui y serait parfaitement appliquée selon elle.
… qui souhaite aussi écouter les ONG
Ces propos ne devraient pas manqué de faire réagir l’ONG Amnesty International, pourtant invitée la veille par la FIFA à échanger avec elle. Le timing de l’instance dirigeante a de quoi interroger…
En effet, ce lundi, toujours dans un communiqué, la FIFA a annoncé qu’elle rencontrerait des représentants d’Amnesty International, une ONG qui lutte pour les droits de l’homme dans le monde. Celle-ci alerte depuis des années sur les conditions catastrophiques des ouvriers, le plus souvent étrangers, sur les chantiers des stades prévus pour le Mondial 2022 au Qatar.
Des lanceurs d’alertes
De fait, dans une enquête sortie en février 2021 par le journal britannique The Guardian, environ 6500 travailleurs migrants seraient décédés depuis l’attribution de la Coupe du Monde au Qatar en 2010, dont une partie sur les chantiers de construction et de rénovation des stades. Ces décès auraient été principalement causé par les fortes chaleurs sévissant une grande partie de l’année dans le pays.
De concert avec le gouvernement qatari, la FIFA s’était alors défendue en rappelant “les mesures de santé et de sécurité très strictes” mises en place sur les sites. Elle s’était aussi permise une comparaison en ajoutant que “la fréquence des accidents sur les chantiers de la Coupe du Monde de la FIFA a été faible par rapport à d’autres grands projets de construction dans le monde”.
Dernièrement, en février dernier, Amnesty International France, en lien avec Football Supporters Europe (organisation qui coordonne l’ensemble des supporters européens), a de nouveau exigé le respect des droits des travailleurs au Qatar.
L’ONG a mis en avant les évolutions législatives au Qatar depuis 2018 avec l’instauration d’un cadre législatif. Néanmoins, elle déplore que les pratiques ne changent guère sur le terrain. Par ailleurs, les représentants français d’Amnesty International ont convenu que le Mondial a permis de braquer la lumière sur le Qatar et les conditions de travail qui y sévissent pour mieux les améliorer, une des positions tenue avec force par la FIFA. Selon eux, la lutte est toutefois très loin d’être terminé et doit se poursuivre pour mieux protéger les travailleurs migrants, y compris après la compétition.
Sur la politique des droits de l’homme de la FIFA au Qatar, Amnesty International France l’a qualifié “d’assez cosmétique” et parle de “position hypocrite”, même si elle reconnaît que la FIFA ne peut imposer des décisions à un pays souverain. Dans cette perspective, l’ONG encourage donc l’instance dirigeante du football à se munir enfin de critères pointus lors de l’octroi des compétitions.
Une rencontre intéressante qui promet des débats agités
A la lumière de ces déclarations, nul doute que la FIFA et Amnesty International auront des choses à se dire. Pour encadrer la discussion au préalable, la FIFA a toutefois indiqué que “les débats porteront principalement sur la situation des employés du secteur des services et plus spécifiquement dans le domaine de l’hospitalité”.
Elle a aussi ajouté qu’elle était toujours ouverte “à un débat constructif et transparent” et que la prochaine Coupe du Monde “deviendra un moteur du progrès social dans le pays hôte”.
Pas certain que les représentants d’Amnesty International soient totalement d’accord avec cette vision…