FC24 (ex-FIFA) a-t-il démocratisé le “mauvais” football ?

par

Fifa a-t-il éduqué les fans au
Fifa a-t-il éduqué les fans au “mauvais” football ? © IMAGO

FC24 (ex-FIFA) est un jeu joué dans le monde entier ! Cependant, l’impact de ce jeu est-il réellement bénéfique pour le sport en lui-même ?

Avant toute chose, il est important de préciser que je suis moi-même un grand consommateur de jeux vidéos, et bien entendu de FC24 (anciennement appelé FIFA). Depuis déjà plusieurs opus, un mode de jeu est extrêmement populaire : le mode Ultimate Team. Le but est très simple, construire son équipe de rêve.

Pour bâtir votre 11 idéal, vous devez obtenir des cartes à l’effigie de vos joueurs que vous pouvez acheter sur un marché fictif, ouvrir des paquets aléatoires, ou échanger plusieurs joueurs pour obtenir un élément précis (Défis de Création d’Equipes, ou DCE). Mais face à une demande toujours plus grande, et toujours plus dépensière, EA Sports, et FC24, doit produire quotidiennement du contenu pour satisfaire cette croissance galopante. Et pour beaucoup, c’est un fléau…

FC24, une très belle vitrine du football

  • Une immersion quasi-totale au sein d’un club en mode carrière

En plus de cette partie Ultimate Team, FC24 possède un autre mode de jeu très apprécié : le mode Carrière. Vous allez pouvoir prendre les rênes d’un club, piloter le recrutement de ce dernier, les finances, les axes de développements… De plus en plus complet, ce mode de jeu propose une véritable simulation, à l’image de la référence Football Manager. Ainsi, le gameplay passe pratiquement sur un plan secondaire au détriment d’heures entières à dénicher les pépites et les wonderkids de FC24. Les jeunes joueurs ont donc un premier aperçu des métiers du football qui entourent une équipe professionnelle, et peut créer d’autres rêves dans la tête de beaucoup de passionnés du ballon rond.

  • Le football féminin au cœur du jeu

Cette année, EA Sports, via le biais du mode Ultimate Team, a placé le football féminin au cœur de son jeu vidéo. Avec des notes équivalentes aux joueurs masculins, les joueuses professionnelles sont présentes dans la très grande majorité des équipes. Décriées par “certains” en amont de la sortie officielle de FC24, elles ont poussé de beaucoup de médisants à retourner leurs vestes après qu’ils ont joué avec la légende américaine Mia Hamm, ou encore après qu’ils ont obtenu une version améliorée de Wendie Renard.

L’impact de FC24 est tel qu’aujourd’hui, de plus en plus de fans de football masculins s’intéressent aux performances et aux résultats de leurs joueuses virtuelles, ou encore de leur équipe de cœur version féminin. Selon Statista, les stades de D1 Arkema comptabilisent une hausse moyenne de spectateurs de près de 25%. FC24 n’y est pas pour rien, et c’est une très bonne chose de voir de plus en plus de reconnaissances du football féminin et ses footballeuses talentueuses !

L'équipe féminine du FC Barcelone qui comptent les meilleurs talents
L’équipe féminine du FC Barcelone qui comptent les meilleurs talents © IMAGO

Oui, mais voilà, malgré toutes ces belles choses et ce combat sociétal sur l’égalité homme-femme que FC24 a remporté haut la main, plusieurs choses font que le jeu influence, et peut-être en mal, la façon de consommer le football et tous ses aboutissants…

FC24, une dépendance qui a créé un nouveau football

  • Une course aux notes toujours plus hautes

Quelques semaines avant la sortie officielle du jeu, les premières notes des joueurs sont publiées, et c’était déjà, pour beaucoup, source de débats… Cristiano Ronaldo mérite-t-il 86 de note général quand Lionel Messi, son fidèle némésis, a 90 ? Gregor Kobel et son 87 de général est-il nécessairement meilleur que Emiliano Martinez (85) ?

Et cette escalade de notes se renforce d’autant plus une fois le jeu sorti. Avec cette demande galopante, FC24 est tenu de sortir chaque semaine de nouvelles cartes aux designs toujours plus attirants. De mi-septembre à aujourd’hui, début février 2024, plus de 50 versions de cartes différentes ont vu le jour.

Un contenu qui pourrait être utilisé pour équilibrer les cartes des joueurs et permettre à tous d’avoirs leur équipe de rêve ? Cela aurait été utopique… Le but de ces cartes, en plus d’inciter l’achat de Points FIFA (une façon de payer des paquets de cartes avec de l’argent réel), est de renforcer les meilleurs cartes du jeu, dites “meta”.

Un joueur meta est une carte qui aura des caractéristiques physiques avancées par rapport aux autres joueurs. Comme l’intelligence de jeu et les capacités mentales ne sont pas réellement pris en compte, mais plus du ressort de celui qui tient la manette, certains joueurs vont donc être avantagés par leur vitesse, leur agilité, leur équilibre, ou encore les animations uniques que peuvent certains joueurs (Yohan Cruyff, Cristiano Ronaldo, Ruud Gullit…).

Mais quand il s’agit d’Adama Troaré, de Ryan Kent ou encore de Romain Alessandrini, il est quand même difficile de les imaginer dribbler facilement Booby Moore, Carles Puyol ou encore Thiago Silva. Et le débat est aussi valable dans l’autre sens. Il est plus compliqué sur FC24 de jouer avec Dennis Bergkamp, Juan Roman Riquelme ou encore Pavel Nedved, qu’avec Christopher Nkunku ou encore Khvicha Kvaratskhelia. (Perso, si on me demande de choisir un milieu de terrain pour mon équipe de rêve, j’aurai plus tendance à choisir Roy Keane, Michael Essien ou Marco Verratti que Daniel Parejo, qui ont pourtant la même note)

FC24 (ex-FIFA) a-t-il démocratisé le “mauvais” football ?
La légende Paul Scholes (88 de GEN) nettoyant la lucarne du FC Barcelone
  • Un gamplay (manière de jouer) qui entache le football

Pour renforcer cet aspect “meta”, une nouveauté a été ajoutée par FC24 à son jeu : les Playstyles. Il s’agit d’un atout alloué à certains joueurs qui sont à l’aise avec certains types de mouvements sur le terrain. Par exemple, on connait tous les enroulés dévastateurs de Heung-Min Son, les passes incroyables de Kevin De Bruyne, ou encore la conduite de balle parfaite de Lionel Messi. Les mouvements de quelques joueurs dans le jeu se voient donc améliorés en fonction de leurs performances réelles. Sauf que ce petit “boost” est si puissant qu’aujourd’hui des joueurs ne jurent que pas cela, à tel point qu’ils passent leurs matchs à tirer de 35 mètres de l’extérieur du pied ou en enroulant leurs frappes ; et gagnent comme ça…

Au final, un jeu complet et plaisant se retrouve entaché par une communauté qui préfère gagner à tout prix en exploitant la moindre faille, plutôt que d’essayer de juste “jouer au football”.

Pour conclure, nier que FC24 est important pour le football en général serait une hérésie. Le jeu rassemble et divertit des millions de fans à travers le monde, et moi le premier. Mais étant amoureux de ce sport, et de ces artistes, je ne peux m’empêcher de constater (un week-end de FutChampions pour les connaisseurs) la monotonie des équipes et des joueurs utilisés, sans parler de la façon de jouer commune des adversaires. Chacun voit le football d’une manière différente, et c’est ce qui est le plus beau dans ce sport. Le problème est que l’impact de EA Sports est tel que beaucoup voit aujourd’hui un football normé et statistique.